La relation au corps sensible : une voie de renouvellement en pratiques psychosociales

Auteur(s) :

Jean-Philippe Gauthier - Professeur à l'UQAR (Rimouski), Docteur en sciences sociales de l'UFP,

Praticien-chercheur en psychopédagogie de la perception

Serge Lapointe - Docteur en psychologie, professeur émérite de l’Université du Québec à Rimouski dans les programmes en psychosociologie

Diane Léger - Professeure à l'UQAR, Docteure en sciences de l’éducation

Jeanne Marie Rugira - Professeure en psychosociologie à l’UQAR, Docteure en Sciences de l'éducation, Psychopédagogue

Les auteurs de cet article sont tous les quatre membres de l’équipe enseignante qui œuvre dans les programmes en psychosociologie à l’UQAR.   Ils sont également chercheurs au Cercle de Recherche-Intervention en Études des Pratiques Psychosociales (Le CRIEPPS) et membres du Groupe Recherche en Approche Somato-Pédagogique de l’Accompagnement (Le GRASPA). Ce groupe de recherche-formation est dirigé par Jeanne-Marie Rugira[1].  Dans le cadre des activités du GRASPA, ces praticiens-chercheurs tentent de faire des liens signifiants entre les fondements théoriques, axiologiques et pratiques de la somato-psychopédagogie et leurs pratiques en psychosociologie.  Ils partagent la même passion pour le travail du corps sensible.  Ensemble, ils cherchent à voir en quoi le recours aux outils pratiques de la somato-psychopédagogie peut véritablement leur permettre de dépasser l’unique sphère de la transformation personnelle, pour impulser un vrai renouvellement dans leurs pratiques professionnelles.  Dans le cadre de cet article, ils vont présenter une étude de cas en vue d’illustrer leur travail de recherche-formation coopératif.

1.         Éléments de contexte : la psychosociologie à l’Université du Québec à Rimouski

1.1       À propos de notre milieu socioprofessionnel d’appartenance

Les programmes en psychosociologie à Rimouski existent depuis les années 1970.  L’UQAR[2], une jeune université de l’Est du Québec fondée en 1969, s’est dotée assez tôt d’un programme de formation d’adultes qui détenaient une formation professionnelle initiale.  Il s’adressait à des praticiens qui travaillaient déjà avec différents groupes dans le milieu de l’éducation, de la gestion des organisations et de la santé.  Le programme était destiné aux personnes engagées dans toute forme de pratiques psychosociales.

Intitulé Certificat en animation, ce programme avait pour axe intégrateur l’intervention dans les petits groupes de tâche (LAPOINTE, 2001).  Par le fait même, le travail au sein de ce cursus se situait au cœur des objets d’études prioritaires en psychosociologie. L’émergence des pratiques de ce type d’intervention psychosociologique a coïncidé avec les besoins d’une société en mutation qui est née de ce qui s’est appelé ici la Révolution tranquille.  En effet, dès le début des années 1960, le Québec a connu une transformation sociale et culturelle profonde qui s’est inscrite en rupture avec la société traditionnelle d’avant ces années-là. « Dans la société traditionnelle, le soutien social constituait un devoir religieux.  Dans la modernité, il est, en partie, l’enjeu de processus rationnels de résolution de problèmes ». (TESSIER, TELLIER, 1990, pp. 57-88). La psychosociologie apportait ses ressources théoriques et méthodologiques aux artisans de l’émergence de cette modernité dans de multiples milieux.  La psychosociologie telle qu’enseignée à l’UQAR s’inspire abondamment des travaux de Kurt Lewin dans l’élaboration de ses contenus et aussi dans sa pédagogie, notamment par l’utilisation de la méthode laboratoire. Elle était aussi profondément inspirée par les fondements théoriques du courant américain du potentiel humain dont Abraham Maslow et Carl Rogers sont les dignes représentants.

Trente cinq ans plus tard, la psychosociologie à Rimouski se déploie dans de multiples programmes de premier et de deuxième cycles dont le champ d’études est toujours centré sur les interactions humaines et l’accompagnement du changement humain.  Ces années d’enseignement, de recherche et d’interventions dans le milieu ont permis la construction de nouveaux programmes, aussi bien dans le secteur de la formation initiale que de la formation continue.  De plus, ils ont permis l’émergence de nouveaux savoirs et le développement des dimensions pratiques et théoriques d’une profession qui s’avère encore aujourd’hui nécessaire pour accompagner les mutations qui traversent nos familles, nos institutions et nos communautés.   

Ces développements furent particulièrement intenses au cours de la dernière décennie notamment par l’arrivée de nouvelles ressources et la fécondation de la psychosociologie par d’autres disciplines au sein même des activités traditionnelles de formation.  Nous pensons particulièrement ici à l’introduction des travaux de Danis Bois et de ses collaborateurs en somato-psychopédagogie.  Ces travaux ont permis l’introduction des réflexions et d’expérimentations fructueuses autour de la question de la place du corps dans le champ de l’accompagnement des processus de changement humain.  Ce type de préoccupation était jusque-là plutôt absent dans nos programmes.  Il nous semble indispensable de noter également, que les approches biographiques occupent une place de choix dans la psychosociologie rimouskoise et qu’elles constituent un apport majeur dans nos méthodologies de travail et nos références théoriques au premier comme au deuxième cycle.  L’apport principal des approches biographiques en formation telles que développées par Marie-Christine Josso à l’Université de Genève et Gaston Pineau à l’Université de Tours, teintent fortement nos travaux de recherche, de formation et d’intervention.  Nos programmes en psychosociologie s’inspirent également des travaux issus du courant de sociologie clinique, un courant développé sous l’impulsion de Vincent de Gaulejac et de ses collaborateurs. L’influence de ces différentes approches favorise dans nos programmes de formation er d’intervention, le développement des modalités pédagogiques spécifiques à la construction d’un ancrage socio-historique à nos expériences et trajectoires personnelles et sociales.

1.2       La formation en psychosociologie à l’UQAR

La formation en psychosociologie vise dans son curriculum les objectifs concernant  les quatre piliers de l’éducation : le savoir-être, le savoir vivre-ensemble, le savoir-faire et le savoir. Le paradigme de notre champ d’étude privilégie d’axer ses interventions sur le potentiel et le développement des personnes et des communautés plutôt que sur la pathologie et la restauration des individus ou des systèmes.  C’est ainsi que se prolonge encore dans ces programmes de formation la mutation paradigmatique initiée par Kurt Lewin et ses successeurs ici au Québec[3].  Nous assistons alors au passage de la posture de l’expert à celle de l’accompagnateur dans les pratiques psychosociales[4]

Dans une approche d’expertise, le formateur ou l’intervenant se préoccupe du problème vécu par les personnes.  Son intervention vise à produire lui-même des idées et des actions utiles à la résolution du problème.  La situation problématique est définie comme une matrice de contenus sur laquelle il faut d’abord travailler intellectuellement avant d’intervenir.  Par ailleurs, dans une approche d’accompagnement, l’intervenant se préoccupe d’abord des personnes.  L’accompagnateur aide ses clients à se responsabiliser en vue de résoudre eux-mêmes leurs problèmes avec son assistance.  Ainsi, la situation problématique est approchée comme un ensemble de processus psychosociaux à élucider pour faciliter le fonctionnement optimal des personnes et des groupes.  À Rimouski, l’accompagnement devient de plus en plus un domaine d’études dont les frontières sont de mieux en mieux définies par rapport, entre autres, à l’aide psychothérapeutique ou encore aux pratiques de changements envisagées sous l’angle sociologique.  En effet, nos pratiques d’accompagnement visent le développement de la conscience des individus et de leurs communautés.  Elles concernent à la fois la formation, le soin et la croissance des personnes et de leurs collectivités et s’inscrivent dans une vision intégrale et holistique qui prend en compte les dimensions biologiques, psychoaffectives et spirituelles de l’être humain.  Nous reconnaissons ces dimensions comme étant indissociables et nous considérons important de ne pas les confondre et de n’en ignorer aucune.

1.3      La recherche – intervention en psychosociologie à l’UQAR

Les professeurs chercheurs qui œuvrent  dans les programmes de psychosociologie à l’UQAR ont fondé le Cercle de recherche – intervention en études des pratiques psychosociales (Le CRIEPPS).  Il s’agit d’un cercle transdisciplinaire de recherche et d’intervention en relations humaines. Des chercheurs en provenance d’autres universités québécoises, canadiennes et étrangères qui s’intéressent à l’étude des pratiques d’accompagnement du changement humain participent également aux activités de ce cercle. C’est à titre de membre associé à l’un ou l’autre des groupes de recherche qui le constituent que chercheurs, étudiants et praticiens sont accueillis au sein de ce cercle.

Le CRIEPPS s’est essentiellement donné comme mission de favoriser la démocratisation des savoirs par le biais de la recherche en études des pratiques psychosociales en réunissant et en formant des praticiens - chercheurs qui veulent réfléchir sur leurs pratiques.  Ces praticiens - chercheurs tentent de comprendre les processus d’accompagnement et de changement humain en vue de se renouveler, de renouveler leurs pratiques, de produire du sens ainsi que de nouvelles connaissances. Les membres de ce cercle mènent également des activités de consultation sous forme d’intervention, de formation ou encore de recherche-action auprès des organisations, des groupes ou des communautés.  Ces activités sont menées en collaboration avec des praticiens préoccupés par différentes dimensions des interactions humaines ou encore par un souci de renouvellement de leurs pratiques.

Cinq grands chantiers font l’objet d’explorations nouvelles et permettent aux membres de ce cercle de développer des créneaux inédits de recherches dans la ligne des préoccupations actuelles et émergentes dans le domaine des études pratiques psychosociales.  Un groupe de recherche est constitué autour de chacun de ces axes.  Les auteurs de cet article mènent les activités de recherche dont ils font brièvement mention dans le présent texte. Les activités regroupées autour d’un de ces axes, ont donné naissance au Groupe de Recherche en Approche Somato-Pédagogique de l’Accompagnement (Le GRASPA)Les travaux de ce groupe se font dans la filiation de l’œuvre de Danis Bois et son équipe.  À partir des apports théoriques et pratiques de la Somato-Psychopédagogie, ces chercheurs s’inscrivent dans une perspective de recherche-formation-action et s’appuient sur une posture qui tente de dépasser la vieille séparation corps - esprit en vue de renouveler leurs manières d’appréhender la question de l’accompagnement du devenir humain ainsi que leurs manières de déployer leur fécondité heuristique.

1.4       Quelques considérations méthodologiques

En cohérence avec l’épistémologie propre au champ d’étude des pratiques psychosociales, nos recherches s’inscrivent dans le paradigme interprétatif.  Définitivement situées dans le modèle du praticien réflexif (Schön, 1987) , nos recherches s’inscrivent principalement dans le modèle des recherches inductives et exigent ainsi des méthodologies propre à l’observation et à la réflexion dans et sur nos pratiques.  Différents dispositifs de collecte de données relatives à nos pratiques sont utilisés en vue d’identifier et de décrire les pratiques de formation ou d’intervention en question. Des sources écrites produites par les chercheurs en lien avec leurs pratiques sont recueillies.  Des échanges dialogiques au sein de notre coopérative de production et d’échanges de savoirs autour de ces écrits sont réalisés sur une base régulière et parfois traversés par des pratiques d’entretien d’explicitation ou encore par des ateliers d’analyse réflexive des pratiques de type praxéologique. 

En vue d’analyser ces données et de dégager des connaissances nouvelles issues de ces pratiques, nous nous inspirons entre autre de l’analyse par théorisation ancrée. Une approche de théorisation empirique et inductive initialement développée par Glaser et Strauss (1967) puis adaptée et transformée par Paillé (1994). Ce type d’analyse se déroule au sein d’un processus itératif qui implique la « simultanéité de la collecte et de l’analyse, du moins au cours des premières étapes » (Paillé, 1994, p. 152).

2.        La consultation : une pratique psychosciale

2.1       Étude de cas : une demande de formation faite à Samuel, un consultant dans les organisations

Samuel est un praticien-chercheur membre du GRASPA. Il est aussi consultant.  Récemment, il a reçu une demande pour une formation de la part d’un établissement scolaire de sa région sur le thème de la reconnaissance non rémunérée dans les milieux de travail.  La formation s’adressait aux trente-cinq cadres et professionnels de l’établissement.

La consultation est une forme que prend parfois l’exercice du métier de psychosociologue.  Contrairement à l’exercice du métier en institution, le consultant intervient ponctuellement sur une problématique spécifique avec un contrat négocié à chaque fois.  Les objectifs de l’intervention visent presque toujours à introduire un changement dans un système humain dont la taille peut varier, selon que le changement concerne un petit groupe ou des ensembles plus larges dans l’institution.  Dans ces situations, un des rôles du psychosociologue est d’accompagner le changement sur une période de temps nécessaire pour que la nouveauté puisse émerger et s’intégrer.  Comme l’explique Kurt Lewin[5], la nouveauté se manifeste souvent en passant par des périodes de déstructuration et de turbulence.  Ainsi, le souci de prendre soin est particulièrement important dans l’accompagnement de ces phases plus difficiles dans les processus de changement.  L’accompagnement du changement est un métier exigeant qui nécessite de prendre à soin parce que le changement ne dépend pas de la seule sphère de la logique rationnelle.  Le changement humain concerne bien plus que la seule sphère cognitive.  Il implique toute la personne et requiert des transformations dans toutes ses dimensions, notamment la dimension ontologique.  Depuis les travaux de Kurt Lewin au milieu du siècle dernier, ces faits font partie des acquis pour les professionnels dont le métier est d’introduire et d’accompagner des changements dans des systèmes humains.

Les difficultés rencontrées dans les tentatives de réduction des préjugés ou, d’une façon ou d’une autre, de changement de la vision sociale de l’individu ont mené à la constatation que la rééducation ne peut pas être un processus simplement rationnel. (Lewin, 1991, p. 5)

Plus tôt, dans le même texte, Lewin explique que le changement dans les conduites nécessite un changement de culture.

Si les processus qui mènent aux préjugés et aux illusions et ceux qui mènent à une perception et à des concepts sociaux réalistes sont essentiellement les mêmes, alors la rééducation doit être un processus fonctionnellement semblable à un changement de culture.  C’est un processus dans lequel les changements dans les connaissances et dans les croyances, les changements de valeurs et de standards, les changements de liens émotifs et de besoins, et les changements dans la conduite de tous les jours, surviennent non pas un à un et indépendamment les uns des autres, mais dans le cadre de la vie totale de l’individu dans le groupe. (Op. cit., p. 3)

Un des cas de figure les plus fréquents qui amène des organisations à demander de l’aide concerne l’accompagnement des groupes dans lesquels les conflits interpersonnels nuisent à l’accomplissement des tâches et dont les dysfonctionnements peuvent aller jusqu’à mettre en danger la raison d’être de ce groupe dans l’organisation.

2.2       L’héritage socioprofessionnel de Samuel : un praticien-chercheur en psychosociologie

Le psychosociologue est habilité à aider les groupes dans toutes sortes de situations y compris celle de l’accompagnement de résolution de conflits.  Quelles que soient les situations, le spécialiste de l’interaction entre les humains est expert sur le processus plutôt que sur le contenu.   Le psychosociologue tel que Samuel le conçoit mise sur les ressources latentes dans le groupe et chez les personnes pour atteindre les objectifs de ses interventions.  Dans cette perspective, l’accompagnement s’appuie sur du potentiel scellé dans la personne ou au sein du système, qui est à découvrir et à actualiser. 

Dans la demande dont il est ici question concernant la reconnaissance, il s’agit moins d’un long processus d’accompagnement du changement dans un système que de proposer des pistes pour réfléchir ensemble sur la question de la reconnaissance au sein des organisations. Au point de départ, il s’agit d’un projet de formation de courte durée dont les bénéficiaires profiteront éventuellement pour introduire des changements dans leurs pratiques personnelles et institutionnelles.  À la différence de plusieurs autres professionnels des sciences humaines et sociales davantage centrés sur leurs compétences et expertise sur les contenus, même dans une formation relativement brève, le psychosociologue ne perd pas de vue la compétence de ses interlocuteurs et sa centration sur le processus.  Samuel s’est donc appuyé sur ses habiletés concernant l’animation du processus dans un groupe d’apprentissage et sa vision concernant le changement des êtres humains pour élaborer une première version du déroulement de la journée. 

La vision qui guide Samuel dans l’exercice de son métier de consultant psychosociologue relève des acquis de sa formation initiale et de son expérience dans le métier.  Ces acquis comprennent entre autre les conceptions du changement telles qu’élaborées dans l’œuvre de Lewin (1951) et ses apprentissages personnels dans le cadre d’un intérêt professionnel prolongé pour le travail avec les petits groupes.  Pour lui, le petit groupe est un point médian dont le support est absolument nécessaire pour accompagner le changement chez les individus et dans les systèmes humains comme les organisations ou les communautés locales.  Déjà, cette idée de l’importance d’un groupe d’appartenance pour soutenir le changement individuel est abondamment documenté dans les travaux de Lewin et des psychosociologues québécois de la première génération dont on retrouve les travaux dans l’œuvre monumentale en huit tomes de Roger Tessier et d’Yvan Tellier.

La demande adressée ici à Samuel n’en est pas une d’accompagnement d’un changement de culture concernant les pratiques de reconnaissance dans l’institution.  Cela aurait toutefois pu être possible et il existe de la documentation qui relate des expériences de ce type.[6]  La demande à laquelle nous nous intéressons ici, en est une de formation ponctuelle dont le but est d’acquérir des savoirs nouveaux ou rafraîchir des savoirs anciens dans une perspective de perfectionnement.

Dans la filiation des travaux de Lewin, au carrefour de ceux de Rogers, une équipe de chercheurs de l’Université de Sherbrooke (LESCARBEAU, PAYETTE ST-ARNAUD, 2003) sous la direction de Yves St-Arnaud ont modélisé une approche de l’intervention psychosociologique telle que nous l’enseignons et la pratiquons à l’UQAR.  Ce modèle propose une panoplie de rôles que peut exercer le psychosociologue au sein d’une l’organisation.  Dans ce cas-ci, c’est le rôle de formateur qui est sollicité. 

Le consultant exerce un rôle de formateur lorsqu’il intervient en tant que personne-ressource auprès d’un groupe d’apprentissage pour exécuter une activité visant l’acquisition d’habiletés interpersonnelles ou professionnelles.  (…) L’objectif de l’intervention est de produire de nouveaux apprentissages dans le système-client. (Op.cit., p. 28)

Samuel a alors pris soin de vérifier auprès des demandeurs ses premières intentions concernant l’organisation de la journée qui révélaient, en même temps sa philosophie d’intervention que ses prémisses quant au déroulement d’une activité de formation en psychosociologie. 

2.3       Trois variables privilégiées par Samuel dans son intervention de formation

Les informations qui furent échangées entre le consultant et les représentants du groupe demandeur ou système-client dans la phase dite de l’entente dans le processus de consultation (op cit., pp. 103-125), se concentrent autour de trois variables.  Ces dernières concernent la dimension horizontale plutôt que verticale dans l’apprentissage, l’interaction comme condition nécessaire pour apprendre et finalement l’utilisation des ressources des personnes dans le groupe.  Ces variables s’incarnent dans des formes qui touchent à la fois l’organisation spatiale, le partage de la parole et la nature des échanges collectifs pour favoriser la production de sens et de savoirs concernant le thème de la reconnaissance. 

- Horizontalité et interaction

À propos des deux premières variables, celles concernant la dimension horizontale de la formation et l’interaction, les demandeurs furent informés que, plutôt que d’écouter les propos du consultant, les participants seraient invités à travailler en petites équipes et à échanger en grand groupe sur le thème de la reconnaissance.  En lieu et place de l’expert attendu sur la question de la reconnaissance, arriverait un accompagnateur de l’apprentissage de « l’être-ensemble » et du « travail-ensemble » capable de proposer des manières de faire participatives. La formule valorisée était susceptible d’introduire une rupture dans les manières habituelles de faire de ce groupe en proposant une forme horizontale qui exige l’implication des participants dans le processus de construction de sens et de savoirs par opposition à la figure bien connue de la transmission verticale des connaissances, partant du maître vers les élèves. 

- L’expérience singulière comme source d’un savoir universel

La troisième variable qui fut soumise aux représentants du groupe concernait la nature des échanges dans le but de produire des savoirs signifiants et vivants sur la reconnaissance.  Cette variable s’incarnait dans une forme accompagnée d’une invitation.  L’invitation était celle de partir de l’expérience singulière de chacun sur la reconnaissance dans sa propre vie personnelle et professionnelle pour appuyer comme une fondation la construction de la journée.  La forme était celle du partage d’un souvenir où le participant s’était senti reconnu. 

Pour faciliter le partage, les participants seraient invités à écrire un texte racontant cette expérience de manière à la rendre réelle, quasi sensorielle et visible pour l’auditeur.  Il s’agirait en somme d’un récit descriptif de type phénoménologique qui rendrait présent l’expérience comme si nous y étions tous et qui commencerait par « je me souviens… ».  L’écriture d’un tel récit ramène l’auteur au cœur de son expérience, permet de l’évoquer et de le partager avec les autres.  Ce partage d’une mémoire vivante est un socle pour construire des savoirs nouveaux et aussi pour construire une communauté d’apprentissage.  Ce type de partage a pour conséquence de relier les personnes dans leurs ressemblances, de dévoiler et accueillir leur différences et leur profonde humanité.  C’est un travail qui réunit le cœur et l’esprit dans l’élaboration d’un savoir savoureux comme le suggère l’étymologie du mot savoir : ce qui a du goût, du verbe latin sapere.  Ce qui nous éloigne des dangers de l’insipide.

2.4      Samuel : un consultant en quête de cohérence

Pour conclure son entente de service avec l’organisation, il avait été convenu que le consultant utiliserait la méthode qui lui convient à la condition qu’un contenu théorique soit transmis aux participants.  Comme à son habitude face à un sujet qu’il ne maîtrise pas, Samuel a commencé sa préparation de cette rencontre par une recherche en bibliothèque et dans les sources écrites.  D’abord surpris par la relative abondance de la littérature et surtout par l’intérêt qu’on porte actuellement au thème de la reconnaissance dans les organisations au Québec, Samuel découvrit rapidement la centralité qu’occupe, qu’on le veuille où non, la question de la reconnaissance dans une culture organisationnelle.  Il fut impressionné par les liens que le thème entretient avec la communication dans les organisations, la mobilisation du personnel, la qualité du travail et même la santé des travailleurs.  Il découvrit des thèses et des mémoires récents sur le sujet où ces thèmes étaient bien documentés.[7] 

Quelques jours avant la date fixée pour l’intervention, il lui sembla que le champ théorique de la reconnaissance avait été assez bien couvert et qu’il était prêt pour formuler un plan bien articulé pour communiquer les connaissances acquises dans la fréquentation de la littérature.  Pourtant, il était habité par un inconfort qui retardait la mise en forme définitive de son projet.  C’est de ce malaise et surtout du chemin de sa résolution dont il sera maintenant question. 

Il faut bien préciser ici que notre consultant est également professeur dans une institution universitaire.  Il a donc développé des rapports au savoir et à la formation qui, bien que teintés des postures psychosociologiques, demeurent empreints de la tradition universitaire.  Une tradition selon laquelle, les savoirs savants sont acquis, mis à jour et produits par les professeurs-chercheurs, qui les transmettent ensuite à leurs étudiants en vue d’une application éventuelle.

Cette première posture se fonde sur une philosophie de la formation verticale et déductive qui s’apparente à une poièsis qui, selon Aristote, est l’action de faire en fonction d’un savoir.  Elle est cette action de fabrication d’un sujet-objet en vue de l’obtention d’un résultat pré-déterminé.  La posture éthique, sociale et politique qui se dégage d’un tel modèle en est une de pouvoir et de domination de la théorie sur la pratique, de celui qui sait sur celui qui ne sait pas.  Les rapports au savoir et à la formation dans la perspective psychosociologique sont tout autres.  Selon notre cadre théorique, la théorie et la pratique, le savoir et la formation, le professeur et les étudiants s’organisent et se fécondent mutuellement dans une structure horizontale.  Il s’agit alors d’une praxis.  La praxis est un acte, un processus de penser et d’agir en solidarité, créateur de savoirs et de sujets.  La posture éthique, sociale et politique qui se dégage d’un tel modèle en est une de création et d’émancipation de sujets en devenir.  Notre consultant oscille donc entre ces deux postures de socialisation. 

Le malaise annoncé plus haut était double et concernait deux types d’incohérence qui, au départ, étaient assez flous.  Il lui semblait en effet que toute cette préparation introduisait un double message dans l’organisation de la journée.  D’une part, la mise en place d’un dispositif pour permettre la résurgence et le partage des savoirs issus des pratiques expérimentées de reconnaissance et d’autre part toute cette préparation livresque sur la reconnaissance.  Comment faire se rencontrer les deux visions de la formation sans distorsion du processus? Comment trouver le lieu unificateur de ses deux postures qui pourrait le sortir de cette dualité? 

L’autre inconfort concernait l’expérience même du consultant par rapport au thème.  Si ses savoirs de psychosociologue étaient au rendez-vous du design de la journée, ses savoirs expérientiels sur la reconnaissance étaient bien peu utilisés et n’avaient pas été au premier plan de sa préparation.  Plus triste encore, il avait l’impression de laisser une partie de lui-même au vestiaire dans sa manière d’apprendre sur la reconnaissance en s’en tenant à la seule littérature sur le sujet.  Cette partie de lui-même abandonnée concernait son être sensible né au contact de la somato-psychopédagogie et de ses apprentissages en fasciathérapie.

Lorsque Samuel est venu consulter son groupe de recherche, c’était dans un premier temps pour avoir une opportunité de voir plus clairement dans ces contradictions qui traversaient sa fonction de consultant et semblait le bloquer momentanément. Nous avons donc décidé de faire une analyse de pratique sur ce cas en vue de lui offrir des voies de passages plus fluides. 

La mise en lumière de ces incohérences fut un premier pas qui a donné suite à l’introduction d’une importante correction dans la préparation de cette journée qui s’est concrétisée par la réponse à la question : comment introduire l’être sensible chez le professeur et le psychosociologue « conditionnés », qui était dans cette impasse?  Le conditionnement nommé ici ne doit pas être entendu avec une connotation péjorative.  Il s’agit bien des habitudes et des comportements issus des apprentissages propres à l’exercice de tout métier.  Si le psychosociologue Samuel avait déjà, par l’intégration des apports de la psychosociologie, modifié ses pratiques d’enseignement, il se rendait bien compte que son expérience du sensible n’était pas ici au rendez-vous de ses pratiques de psychosociologue.  Cela commençait à être trop pesant pour lui. Il était temps de mettre plus de cohérence entre sa vie intérieure et l’exercice de sa profession. Une autre question préoccupait Samuel : est-il possible de développer des connaissances sur la reconnaissance qui seraient issues du rapport avec son être sensible?

Les avancées développées dans la réponse à ces deux questions ainsi que les réflexions qu’elles nous suggèrent feront l’objet de notre troisième partie.

3.         Le renouvellement d’une pratique psychosociale dans les organisations au contact du corps sensible

La recherche d’une réponse aux questions de Samuel s’est faite en deux temps. D’abord, par un travail de mémoire en cohérence avec la proposition annoncée de la rédaction d’un « je me souviens » pour les participants à la journée.  Ensuite, grâce à une introspection sensorielle où fut introduite l’intention d’apprendre sur le thème de la reconnaissance.  L’explication et l’illustration de ce double travail constituent pour l’essentiel la dernière partie de notre étude de cas.

3.1       Un récit d’expérience

Je me souviens…

« Par un bel après-midi hivernal, je suis à Rimouski chez Hannah, mon accompagnatrice en fasciathérapie. Je suis étendu sur sa table de massage, détendu. Et tout à coup elle m’interpelle : « Samuel, il va falloir que tu m’aides…  Moi, j’ai mes mains aux deux extrémités de ton péroné.  Tu les sens ?  Comme tu le sais, cet os est très long et il me semble qu’il aurait besoin que tu en prennes soin toi aussi en le tenant au milieu de sa longueur avec ton attention. » 

Surpris par la proposition et ne sachant pas trop ce que je devais faire pour y répondre, je sentis poindre en moi un véritable élan pour aider Hannah. À l’instar sans doute  de l’enfant que j’étais jadis, qui se précipitait pour aider sa mère.  Je posai mon attention tout simplement à l’intérieur de ma jambe là, où je sentais mon péroné et à une distance qui m’apparaissait comme étant celle qui séparait les deux mains de la fasciathérapeute.  Sans que j’y pense et je dirais même sans que je le veuille vraiment, mon attention se porta avec toute la tendresse, la minutie, la délicatesse dont j’étais capable en cet instant sur l’os dont l’extrémité qui touche à la cheville était si douloureuse.  Au même instant, je sentis un courant dans l’os, une onde chaleureuse et bienfaisante vint l’envahir.  Je me surpris à penser que c’était moi qui me touchais ainsi, presque comme un autre, et qu’en même temps, j’étais réconforté et soigné par cette attention bienfaisante que je ressentais vraiment comme la présence d’une main qui agissait délicatement dans mon os. 

Je n’étais pas au bout de mes surprises. La séance se poursuivit par une invitation à porter mon attention sur mes deux jambes dans leur globalité.  Au début, je les percevais comme le prolongement de mon corps traversé par le support de leurs os.  Mes jambes m’apparaissaient nettement. Je les percevais avec leurs détails distincts.  J’avais accès à la chair de mes jambes. Je sentais la peau, les muscles et la circulation sanguine, un tout plutôt sombre qui se distinguait des os.  Ceux-ci formaient un autre ensemble distinct inséré dans le premier et lui aussi de couleur sombre presque noire. 

À brûle pourpoint, Hannah me demanda : « est-ce que tu aimes tes jambes? »  Interloqué, je ne sus trop quoi répondre.  « Aimer ses jambes !», tu parles d’une question!  Je répondis sans trop de conviction que sans doute que oui mais qu’au fond, je ne le savais pas.  Elle me fit alors l’injonction suivante : « mets ton cœur avec tes jambes ».  Placer mon attention sur mon péroné, j’avais su faire.  Mettre mon cœur avec mes jambes, là j’étais subitement dépassé.  Heureusement, je me laissai être dépassé, je me découvrais capable de rester dans le « ne pas savoir ».  Par une heureuse alchimie dont j’ignore tout du mode d’emploi, il se passa alors quelque chose en moi et cela se fit.

Seules des métaphores peuvent décrire ce type d’expériences dont il est difficile de rendre compte avec des mots.  En effet, une partie de moi se retira comme le ferait une personne placée sur une ligne avec d’autres et qui reculerait d’un pas pour laisser la place tout en demeurant intéressée par les événements sans intervenir.  En même temps, un autre acteur prit la relève de l’attention ou plutôt, une autre instance, comme une vraie personne bienveillante se relia à mes jambes.  Encore là, l’effet fut instantané et spectaculaire.  L’expérience d’avoir des jambes se transforma.  Je devins des jambes.  Je devins mes jambes.  Elles avaient une histoire, des choses à dire, de l’humour et des milliers de sensations.  Toutes ces sensations se résumaient dans un terme qui me parlait tellement à ce moment-là : mes jambes s’humanisaient.  Je me retrouvais non seulement dans mes jambes mais dans les plus infimes parties de celles-ci. 

Cette expérience bouleversa ma compréhension de la globalité.  Jusque-là, je pratiquais la globalité en essayant de placer ma conscience sur tout mon corps en entier et en même temps comme s’il était enveloppé dans une bulle depuis la racine de mes cheveux jusqu’à la plante de mes pieds.  Là, la globalité était partout, j’étais dans cette globalité, j’étais global.  J’étais partout, dans ma cheville, dans les orteils, dans le genou, dans la cuisse, à l’intérieur, à l’extérieur.  Chaque partie était moi et me contenait tout entier.  Plus besoin de bulle.  Une attention bienveillante de cette instance que j’associai au cœur suffisait pour que le tout apparaisse dans la partie.  Pourtant, ce n’était pas mon cœur habituel.  Ce n’était pas un cœur affectif avec de la peine ou d’autres émotions.  En même temps ce cœur-là n’était pas dépourvu de sentiments.  Il était certainement pourvu de bienveillance et ce matin-là, il était plein et reliant.  Sa seule présence était reliance. 

Je fus habité longtemps après le traitement par cette possibilité inestimable que nous avons d’entrer intimement en relation avec nous, cette capacité de nous toucher, nous soigner, prendre soin de nous. Ma perception du prendre soin venait de se transformer.  Encore maintenant, je peux revivre un tel abord avec la même candeur,  tel un enfant qui ose prendre soin avec ferveur, naïveté et simplicité, tout content de pouvoir être utile, sans pour autant savoir ce qui va arriver. Dans une ignorance totale mais pourtant créatrice de ce qui adviendra.

Pour terminer ce récit par les héroïnes de cette séance d’accompagnement manuel, que furent mes jambes, je découvrais au fur et à mesure que ce processus progressait que tout en étant entièrement dans l’instant présent, mes jambes savaient tout de leur histoire avec moi et de mes rapports d’indifférence et de méconnaissance avec elles.  Aussi, comme une voix intérieure, je les entendis me dire : « tu sais, nous savons plein de choses ».

3.2       Un savoir corporéisé et immanent sur la reconnaissance

« L’intelligence n’est pas affaire de diplômes.[…] L’intelligence est la force, solitaire, d’extraire du chaos de sa propre vie, la poignée de lumière suffisante pour éclairer un peu plus loin que soi – vers l’autre là-bas, comme nous égaré dans le noir. » (Bobin 2004, p25)

Des expériences comme celles-ci ne sont pas faites pour inspirer le domaine de la fiction, ni pour rester confinées dans le domaine de l’intime.  Elles doivent servir à éclairer notre compréhension de nous-mêmes, de la vie humaine, de nos manières d’être au monde ainsi que la conduite de nos activités.  C’est ainsi que Samuel, confronté à l’insuffisance de son expérience à propos des enjeux majeurs qui traversent la question de la reconnaissance dans les organisations, se rappela sa dernière expérience vécue en fasciathérapie, une expérience qui lui avait laissé entrevoir un potentiel de savoirs jusque-là inexplorés. 

En effet, l’expérience du corps sensible dévoile une forme tout à fait évidente de compétence humaine que nous appellerons ici : « intelligence sensorielle ».  Pour Danis Bois, cette forme spécifique d’intelligence évoque :

« les capacités que peut développer un sujet, dans certaines conditions, pour saisir, reconnaître et traiter les informations internes qui lui sont fournies par son rapport au corps sensible. » (Bois, 2007, p. 360)

Comme on peut le constater dans l’exemple donné dans cette étude de cas, il faut créer des conditions grâce à une pédagogie particulière qui utilise la médiation du corps et de son mouvement interne pour générer :

« une expérience perceptive porteuse de sens, qui vient nourrir la réflexion. La sollicitation de la potentialité perceptive mobilise la personne dans sa capacité à entrer en relation avec elle-même et avec ses états intérieurs. Ce faisant, elle ne consiste pas en une simple contemplation de ses états corporels : elle invite à une analyse introspective très active et demande un effort réel de la part du pratiquant. » (Bois 2007, p. 73)

3.3       L’introspection sensorielle un chemin d’apprentissage

Pour recourir à cette source immanente de connaissance, Samuel décida tout simplement avec l’aide d’une amie et collègue de s’informer sur la question de la reconnaissance en passant par la relation à son corps.  Familière de la somato-psychopédagogie, la collègue en question guida une introspection sensorielle  avec le projet de leur permettre d’apprendre quelque chose de nouveau sur la reconnaissance. Lors de ce guidage, une insistance particulière fut accordée sur l’attention aux jambes : sensations, perceptions, éprouvés, pensées.  Rapidement, les jambes de Samuel apparurent à sa conscience, comme si elles disaient « présentes! ».  L’intensité et la qualité de cette présence se modulaient en fonction de la réciprocité qu’installait sa relation avec la dimension du Sensible dans son intériorité corporéïsée. Samuel constatait ainsi, une fois de plus, que ses jambes devenaient enseignantes dès qu’il daignait leur accorder son attention.  Dès qu’elles étaient regardées, considérées et reconnues au sein de cette relation intime et impliquée avec son corps sensible, elles se déployaient et par la même occasion le déployaient à son tour.  Un corps dont on a reconnu la part essentielle devient ainsi une fontaine inépuisable de connaissances qui révèle une intelligence illimitée pour informer et former la conscience du sujet sensible qui l’interroge.

3.4       De la relation au corps sensible au renouvellement de l’intervention en psychosociologie

Il n’y a pas d’âme sans corps et pas de corps sans rapport à l’espace et à l’environnement. « Le corps humain est la meilleure image de l’âme humaine. » C’est Wittgenstein qui dit cela. C’est du corps qu’il faut s’occuper, pas du corps vu par la médecine scientifique, mais du corps qui parle, qui se meut, qui s’émeut. » (Roustang, 2006, p.12)

S’il nous semblait évident qu’une telle expérience du corps sensible était forcément transformatrice pour le sujet qui la vit, il reste indispensable à nos yeux de se demander en quoi cette expérience peut participer à renouveler la pratique de l’intervention psychosociologique dans les organisations.  En quoi une telle expérience peut dépasser la sphère de l’intime pour éclairer nos manières d’être, de vivre ensemble et d’agir dans le monde ?  Comment pouvons-nous apprendre à laisser notre intériorité corporéisée inspirer notre rapport au monde et notre agir au quotidien?

Pour tenter de répondre à ces questions, notre équipe a voulu accompagner le processus formateur de Samuel tel que présenté dans notre étude de cas, en vue de pouvoir identifier avec lui, les apprentissages qui en découlent et qui pourraient être utiles à chacun d’entre nous.  L’expérience singulière et spécifique que Samuel fait ici grâce à sa relation au corps sensible, est-elle en mesure d’informer les praticiens psychosociologues que nous sommes ? Peut-elle réellement nous servir d’ancrage lorsque nous traitons les questions relatives à l’accompagnement des processus liés à une meilleure gestion des personnes en milieu organisationnel et plus spécialement les questions relatives au thème de la reconnaissance ?

- Premières tentatives de liens

Dans un premier temps, nous avons tenté de survoler le récit que Samuel fait de son expérience du corps sensible, en vue d’y trouver des essais de réponses à sa préoccupation de départ concernant le thème de la reconnaissance dans les milieux de travail.  Samuel a voulu interroger son expérience relationnelle avec son corps sensible.  Il espérait que cette expérience puisse lui révéler une manière inédite d’appréhender la question de la reconnaissance dans le domaine de la gestion des personnes en milieu organisationnel.  Son expérience d’introspection sensorielle a alors ravivé la mémoire corporelle de son expérience précédente et lui a permis d’intégrer et de mieux s’informer à partir de ce qui se jouait au sein de son intimité corporelle.  Samuel avait comme objectif de tenter de s’appuyer sur son expérience pour apprendre de son corps et pour renouveler et éclairer sa pratique professionnelle d’accompagnateur du changement humain dans les groupes, les organisations et les communautés. 

  • Le tout est dans la partie : un savoir relationnel

Nous constatons dans un premier temps, que l’entendement amorcé dans l’expérience vécue lors de la séance de fasciathérapie et revécue dans l’introspection sensorielle portait l’essence d’une compréhension renouvelée sur la question de la reconnaissance.  L’attention portée à ses jambes, considérées au début comme des parties de soi et qui deviennent des hologrammes de toute la personne dans le processus de reconnaissance, constitue l’enseignement existentiel recherché sur la reconnaissance et ses effets sur tout l’organisme.

  • Une attitude attentionnée : source de présence et de reliance

« L’attention est ce moment unique où peuvent se rejoindre l’intelligence et le cœur. » Leloup, 2000, p.37)

En effet, on voit très bien dans la situation que nous venons d’évoquer, qu’une intention sans équivoque d’avoir une attitude attentionnée face à une partie de soi, avait comme conséquence directe de relier cette partie à l’ensemble du système humain qu’est l’organisme, et par conséquent de potentialiser et d’humaniser tout le corps ainsi que le sujet sensible qui s’expérimente dans ce corps.  Si nous tentons de transférer cette compréhension au domaine de la gestion des personnes en milieu organisationnel, nous pouvons dire qu’une intention sans équivoque d’adopter une attitude attentionnée face à un travailleur dans une organisation a comme conséquence de lui permettre de se sentir relié, considéré et utile à l’ensemble du système.  Du coup, cela potentialise la personne et tout le système auquel elle appartient et duquel elle participe.

-  La relation au corps : vers un sentiment d’appartenance

Nous constatons avec Samuel, qu’il pouvait aller travailler en s’appuyant sur la nouvelle solidité que lui procurait la présence à son corps sensible.  La présence au corps sensible nous permet d’accéder à notre mémoire corporelle et à notre intelligence sensorielle, constituant ainsi une voie de passage souveraine pour atteindre le sensation de globalité ainsi que le sentiment d’être unifié et d’exister.

Nous pouvons dire également que dans le domaine de la gestion des personnes dans les organisations, il est important de ne pas perdre la mémoire organisationnelle, pour ne pas dire organismique.  Le travail de la mémoire procède à la construction de la sensation de globalité et autorise une inscription socio-historique des employés.  La globalité engendre ainsi un sentiment d’exister indispensable à la santé des individus et des systèmes et donne accès au sentiment d’unité qui sort les personnes de l’errance et fonde un sentiment d’appartenance incontournable à leur efficience, à leur productivité et à leur humanité.

- La présence au corps : une médiation pédagogique par excellence

Par ailleurs, Samuel réalisait qu’il pouvait entièrement s’appuyer sur son expérience corporelle immédiate pour former.  Il se rendait compte ainsi qu’il n’était pas suffisant de considérer seulement l’expérience passée, ou encore le recours à une préparation théorique soignée d’avance.  Par conséquent, il est important de souligner que le praticien accompagnateur de changement gagnera ultimement à pouvoir s’appuyer sur son corps en vue de pouvoir être entièrement présent à l’expérience vécue, validée et reconnue telle qu’elle résonne dans son corps et informe sa pensée.  Il devra la reconnaître et l’habiter comme elle se déroule dans l’immédiateté de la rencontre avec les personnes qu’il accompagne.

3.5       Accompagner le changement par la médiation du corps sensible : à quelles conditions?

Après ce premier survol, nous avons voulu procéder d’une manière plus méthodique à une analyse de contenu du récit de Samuel en vue de laisser les catégories émergentes nous informer davantage sur le thème de la reconnaissance dans une communauté vivante.  Le récit de Samuel nous semblait spécialement éclairant sur les conditions de départ pour faire un accompagnement du changement dans cette perspective.  On voit bien que dès le début de son accompagnement, Hannah mobilise l’attention de Samuel et l’oriente dans une direction claire.  Pour utiliser le jargon des psychosociologues, nous pouvons dire qu’elle l’a convié sur le territoire de leur cible commune[8].  Pour cela, il fallait avoir un projet clair et se responsabiliser dans ce projet en vue de permettre à l’accompagnateur de rester à sa juste place et de jouer le rôle qui lui revient.

Nous voyons ici que l’accompagnatrice crée des conditions pour permettre à Samuel de se responsabiliser et de s’engager pour sa vie.  Elle l’invite à déployer son vouloir soutenir  leur projet commun. 

«  Samuel, il va falloir que tu m’aides ! […]Je sentis poindre en moi un véritable élan pour aider Hannah. »[9]

- Une intention claire accompagnée d’une attention bienveillante

Par ailleurs, Hannah va demander un peu plus loin à Samuel de bien vouloir s’engager avec cœur dans ce qu’il fait.  Faire avec cœur, voilà la modalité vitale qu’Hannah avait besoin d’enseigner à Samuel pour que sa volonté d’aider puisse être plus opérante. « Elle me fit alors l’injonction suivante : « mets ton cœur avec tes jambes […] .  Sans que je le veuille vraiment, mon attention se porta avec toute la tendresse, la minutie, la délicatesse dont j’étais capable en cet instant. »[10]

- Une attention créatrice de présence bienfaisante et reliante

« En même temps, un autre acteur prit la relève de l’attention ou plutôt, une autre instance, comme une vraie personne bienveillante se relia à mes jambes. […]  Je sentis un courant dans l’os, une onde chaleureuse et bienfaisante vint l’envahir. C’était moi qui me touchais ainsi, presque comme un autre »[11]

Il est bouleversant de constater qu’une simple intention qui émerge de la profondeur de notre intériorité déploie autant de présence, de douceur et de chaleur qui nous permet d’apprendre à mieux nous traiter au quotidien.  Nous apercevons à quel point il est urgent d’apprendre à nos contemporains à mieux prendre soin de la part inviolable d’eux-mêmes.  En effet, on constate actuellement que nous rencontrons au sein de nos organisations des phénomènes inquiétants de déresponsabilisation.  Nous passons ainsi notre temps à demander à nos patrons où encore à nos collègues, si ce n’est nos enfants, nos parents ou nos conjoints, de réparer en nous les dégâts occasionnés par notre propre maltraitance.  Les dégâts dont nous leur incombons souvent et à tort l’entière responsabilité.  C’est la prise en compte de cette part inviolable de soi dans une attitude attentionnée qui crée une présence susceptible de nous relier à nous-mêmes et aux autres.

«Une attention bienveillante de cette instance que j’associai au cœur suffisait pour que le tout apparaisse dans la partie.  Sa seule présence était reliance .»[12]

- Apprendre à habiter la posture d’ignorance créatrice en accompagnement des processus de changement

«J’étais dans une ignorance totale mais pourtant créatrice de ce qui adviendra. […] Surpris par la proposition et ne sachant pas trop ce que je devais faire pour y répondre, je me découvrais capable de rester dans le « ne pas savoir ».[13] 

Tout au long de son récit, nous suivons à la trace Samuel qui est tout investi dans son apprentissage du « savoir attendre ».  Il apprend à apprivoiser une posture attentive qui attend avec confiance et patience ce qui veut émerger comme piste de solutions aux questions qu’il porte, aux défis qui sont les siens.  Il apprend à attendre que se dessinent les pistes de son accomplissement. « L’attente dont je parle est faite pour créer un état de disponibilité, pour nous mettre en état de souplesse à l’égard des choses, des personnes ou des événements.» (Roustang 2006, p.16)

Comme le dit si bien Roustang, une telle attente surtout si elle est vécue en présence d’un autre, permet à  « l’anecdotique qui l’encombre de laisser place à la clarté, à quelque chose de fluide qui l’habite tout entier». (Ibid, p.16) Une présence attentive à notre corps sensible procède par une forme d’alchimie qui nous échappe et participe à l’advenir du sens en nous et entre-nous. Comme le dit si bien Jean Yves Leloup : « Lorsque je me pose la question de savoir « ce qui est, qui je suis », je découvre en moi-même une information qui provient du sans -forme et qui me donne mon sens. » (Leloup, 2004, p.85

3.6       La reconnaissance mutuelle : un projet d’humanisation

L’intervention psychosociologique au sein des organisations permet de mettre en évidence des phénomènes de souffrance au travail.  Elle révèle non seulement leur amplitude et leur intensité dans la vie des personnes et des équipes de travail, mais également leur genèse et la logique de leur construction.  Notre pratique nous a permis de découvrir que beaucoup de pathologies systémiques s’organisent autour du sentiment de ne pas être reconnu, qui génère souvent la perte de sa propre valeur accompagnée de comportements défensifs, de luttes de place ou encore d’état dépressifs et avec ses conséquences de non productivité.  L’expérience de Samuel nous donne ici trois types de réponses qui semblent d’une pertinence incontestable pour s’adresser à ce type de problématique.   

- Admettre la singularité et l’unicité de chacun

« Je les percevais avec leurs détails distincts et mes jambes s’humanisaient. […] L’effet fut instantané et spectaculaire.  L’expérience d’avoir des jambes se transforma.  Je devins des jambes.  Je devins mes jambes. […] Je me retrouvais non seulement dans mes jambes mais dans les plus infimes parties de celles-ci.»[14]

Nous sommes invités ici à concéder à l’autre son existence propre, sa différence, sa manière singulière de voir le monde, de percevoir les choses et de s’exprimer.  Reconnaître l’autre constitue une invitation à s’ouvrir à l’altérité.  Reconnaître l’autre, c’est comme se reconnaître soi-même.  Cela exige de consentir à s’ouvrir à son unicité et demande de cultiver la curiosité envers soi-même en vue de naître au véritable désir de découvrir comment s’exprime sa propre originalité.  Reconnaître l’autre consiste ainsi à nourrir le désir sincère de repérer et de contempler les possibles de mon propre déploiement qui dépend de ma reliance avec les autres.  Des possibles qui ne peuvent être autorisés que par le libre déploiement de l’autre dans l’expression singulière de ce que lui seul peut faire, de ce que lui seul peut voir et dire parce que c’est justement lui et qu’il n’est pas moi.  Accepter de voir les détails du potentiel de l’autre dans son accomplissement ou du moins en attente d'opportunité pour se manifester, permet de reconnaître l’autre dans sa pleine humanité ce qui a comme conséquence de m’humaniser à mon tour, créant ainsi des conditions indispensables à la santé et à l’équilibre individuel et collectif. 

- Le sentiment de globalité et d’appartenance : une voie de reconnaissance

« Cette expérience bouleversa ma compréhension de la globalité. » [15]

La reconnaissance de chacun des détails dans le rapport que Samuel entretient avec ses jambes dans son expérience en fasciathérapie, nous montre qu’une relation consciente avec les détails donne paradoxalement accès à la globalité.  Ce constat nous sort de la dualité individu versus communauté.  En effet, nos manières d’être ensemble souffrent de l’illusion selon laquelle il faut s’oublier pour préserver la collectivité ou encore oublier l’intérêt commun pour préserver la santé et l’équilibre individuel.  En effet, comme le dit si bien Samuel dans son récit éclairant : « Là, la globalité était partout, j’étais dans cette globalité, j’étais global.  J’étais partout.  Chaque partie était moi et me contenait tout entier. » [16]

Si être global c’est être partout à la fois, si chaque partie de ma jambe peut être moi et me contenir en entier, alors, cette expérience m’enseigne un rapport inédit à moi, à l’autre et à mes communautés d’appartenance.  Ainsi, il est possible de percevoir que l’autre est véritablement moi, qu’il me contient en entier malgré sa différence et grâce à sa singularité inaliénable.  L’autre et moi sommes fondamentalement indissociables.  Son accomplissement participe à me réaliser et ses contraintes m'enchaînent.  Participer à sa libération m’affranchit, m’émancipe et me restitue ma propre possibilité de m’humaniser davantage.  Comme nous le partage avec magnificence Zundel (1997, p.58) : « Il est temps […] de surgir de notre sommeil et d’affronter une tâche à la taille de notre humanité, en réalisant notre pouvoir-être dans cette création nôtre qui est la libération de nous-mêmes. »  

- Prise de parole et historicité : une quête de reconnaissance

« Mes jambes avaient une histoire, des choses à dire. […] Tout en étant entièrement dans l’instant présent, mes jambes savaient tout de leur histoire.  Aussi, comme une voix intérieure, je les entendis me dire : « tu sais, nous savons plein de choses ».[17]

À l’instar de Samuel, qui consent ici à accorder toute son attention à ses jambes et se met à les écouter, nous réalisons que reconnaître l’autre c’est forcément lui accorder son droit de parole et lui offrir notre écoute, assumer notre reliance.  Reconnaître qu’il a une histoire, une expérience porteuse de connaissance et de sens.  La plupart du temps, nous constatons dans notre métier que lorsque cela va mal dans les systèmes humains, on va chercher des solutions ailleurs, sans jamais daigner entendre ce que les gens ont à dire à partir de ce qu’ils vivent.

Aussi, la reconnaissance de soi est une convocation à s’engager consciemment et résolument à honorer soi-même son chemin, son expérience, son histoire et les savoirs d’expérience qu’ils véhiculent.  Se reconnaître revient aussi à assumer son devoir de parole, non-seulement pour soi-même, mais aussi pour participer à la création des communautés vivantes, apprenantes et créatrices d’intelligence collective.

Conclusion

En guise de conclusion, nous tenons à partager l’étonnement qui nous habite après cette exercice d’explicitation, d’analyse dialogique et de production de savoirs à partir de cette étude de cas. En effet, nous avions fait le pari de suivre l’aventure de Samuel en vue de vérifier si notre expérience du corps sensible, en plus de participe au processus de transformation du praticien, peut véritablement être une occasion efficiente de renouvellement de nos pratiques psychosociales et un lieu convaincant de production de sens et de connaissance.  Les résultats de notre recherche nous étonne nous-mêmes.  Nous sortons de cette exercice avec une compréhension beaucoup plus riche, non seulement à propos du phénomène de reconnaissance, mais aussi à propos des processus de transformation personnelle, de renouvellement des pratiques et de production collective des savoirs au contact du sensible.  Nous sommes encouragés à poursuivre nos investigations, en multipliant ces moments de présence, qui réveillent les sens, nous dévoilent le sens du vivant et nous révèlent cette mémoire souveraine qui nous habite. 

Par l’étude de ce cas, nous avons appris sur nous-mêmes et sur nos pratiques psychosociales.  En tant que psychosociologues, nous retenons avec Samuel que « le corps social » n’est pas une métaphore.  C’est une globalité bien réelle et bien vivante qui est présente dans chaque être humain.

Quand nous nous soignons, nous soignons le monde.


[1] Professeure titulaire dans les programmes de psychosociologie à l’UQAR depuis bientôt une dizaine d’années, elle travaille depuis tout ce temps à tisser des ponts entre le champ d’étude de l’accompagnement du changement humain et le champ théorique et pratique de la somatopsychopédagogie.  Elle est aussi chercheure au CERAP et professeure visiteure à l’Université Moderne de Lisbonne

[2] L’Université du Québec à Rimouski

[3] Le champ de la psychosociologie a été particulièrement développé au Québec par Yves Saint-Arnaud et ses collaborateurs de l’université de Sherbrooke au cours des années 1970 et 1980.   Nous sommes des héritiers de ce courant de praticiens-chercheurs.

[4] Ce qui va suivre concernant la psychosociologie à l’UQAR provient des notes de cours de Jeanne-Marie Rugira sur les thèmes évoqués.

[5] Kurt Lewin est le fondateur de la psychosociologie américaine pour laquelle il a développé une méthodologie spécifique recherche appelée recherche-action.

[6] FDO Axion – FRP Groupe Conseil (s.d.).  L’implantation d’une culture de reconnaissance : tous ont un rôle à jouer.  Colloque-exposition en gestion des ressources humaines.  Document disponible sur Internet.

[7] Voir entre autres, PERREAULT, Chantal (2008).  La reconnaissance au travail et les habiletés de communication du gestionnaire.  Mémoire inédit présenté à l’Université du Québec à Rimouski comme exigence partielle du programme de maîtrise en Gestion des personnes en milieu de travail.  Voir aussi SAINT-ONGE, Sylvie, THÉRIAULT, Roland (2006).  « la reconnaissance : théorie, études et pratiques » in Gestion de la rémunération, théorie et pratique, 2e édition.  Boucherville : Gaëtan Morin éd. pp. 373-413.

[8]  Dans la théorie du groupe optimal de Yves St-Arnaud (1978).  Les petits groupes, participation et communication.  Montréal : PUM et CIM, la cible commune est l’objet qui justifie une rencontre de groupe et qui mobilise l’énergie de production des participants dans le processus de participation.

[9] Extrait du récit de Samuel

[10] Extrait du récit de Samuel

[11] Extrait du récit de Samuel

[12] Extrait du récit de Samuel

[13] Extrait du récit de Samuel

[14] Extrait du récit de Samuel

[15] Extrait du récit de Samuel

[16] Extrait du récit de Samuel

[17] Extrait du récit de Samuel

Jean-Philippe Gauthier
Serge Lapointe
Diane Léger
Jeanne Marie Rugira

Informations de publication: 
Sujet sensible et renouvellement du moi - Les apports de la fasciathérapie et de la somato-psychopédagogie. Dir. Bois, Josso, Humpich. Ed. Point d'Appui, Ivry sur Seine

Sources: 

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